Cahier de revendications du 14 juin 2013 à l’université

Le 14 juin 2019, une grève féministe d’ampleur historique a secoué le pays. Nous avons été des centaines de milliers à nous mobiliser pour l’égalité, le respect et la dignité. Quatre ans plus tard, et malgré les quelques avancées, force est de constater que peu de choses ont changé, voire ont empiré pour les femmes et les travailleuse-x-s à Genève et en Suisse. Les inégalités persistent, le secteur universitaire ne fait pas exception. Déterminé-e-x-s à mettre fin aux discriminations et aux inégalités dans le secteur de l’université de Genève, la CUAE, les syndicats SIT et SSP, ainsi que les associations ACCORDER, PAT-UNIGE et AJP-UNI ont élaboré un cahier de revendications en vue du 14 juin 2023. . Il a été voté en Assemblée générale le 28 février 2023. Il sera remis au Rectorat de l’Université de Genève en amont du 14 juin 2023.

Nous voulons que le rectorat s’engage à :

I. Améliorer les conditions de travail et d’études et lutter contre la précarité

  • Standardiser le droit à allonger les études en cas de grossesses et le rendre automatique. Instaurer le droit à allonger les études si la vie familiale le requiert.
  • Étendre à tous les bâtiments l’aménagement d’espaces d’allaitement et ouvrir des lieux de stockage réfrigérés du lait. Créer des espaces mixtes adaptés pour changer les enfants.
  • Garantir des espaces de repos, de rencontre en mixité choisie sans homme cisgenre.
  • Appliquer un règlement analogue à la LEg aux personnes en formation.
  • Remplacer systématiquement les employé-e-x-s en congé maternité ou parental, pour la durée totale du congé, indépendamment du droit à l’allocation perte de gain.
  • Instaurer un droit au congé menstruel. 
  • Stabiliser les postes du CCER, majoritairement occupés par des femmes, et favoriser leur évolution professionnelle. Mettre en place un suivi à travers l’élaboration d’un calendrier et d’objectifs chiffrés dans les facultés. Garantir un suivi effectif par le Rectorat et inclure les résultats de cette politique dans le rapport de gestion. 
  • Instaurer une commission de suivi des indicateurs d’amélioration de l’égalité pour le personnel avec statut public et pour le personnel avec statut privé, incluant des représentant-e-x-s des syndicats et des associations du personnel.
  • Systématiser l’information sur les droits des employé-e-x-s spécifiques à chaque corps (personnel enseignant et de recherche, PAT), communiquée lors de l’engagement par exemple sous la forme de brochures thématiques en plusieurs langues (maternité/parentalité et allaitement, harcèlement sexiste et sexuel, droits liés au travail, RH, etc.).
  • Protéger les employé-e-x-s et étudiant-e-x-s étrangèr-e-x-s en facilitant l’obtention des permis de travail et de séjour. Soutenir ces personnes en cas de renvoi ou de non-renouvellement de permis. 
  • (Ré)intégrer le personnel externalisé qui travaille pour l’Université, notamment le service de nettoyage, de restauration et de sécurité.
  • Harmoniser les conditions de travail vers le haut entre les contrats de droit public (DIP), FNS, et les contrats de droit privé.
  • Harmoniser la durée d’engagement des doctorant-e-x-s et leur assurer un minimum de cinq années de financement.
  • Lutter contre la précarisation par le biais du temps partiel imposé aux femmes (notamment dans les postes d’assistanat, de secrétariat et dans certains services communs).
  • Assurer la transparence sur les taux d’engagement et les salaires pour lutter contre les inégalités salariales. Fournir une analyse genrée des contrats précaires à l’université. 

II. Lutter contre les discriminations dans toutes les facultés

  • Créer une cellule de veille et d’action contre les violences et les discriminations sexistes, lgptqi+phobes, racistes, validistes, classistes, ou basée sur la religion. Cette cellule doit être indépendante et représenter tous les corps. 
  • Lutter contre les violences sexistes, sexuelles et psychologiques
    • Garantir l’accès au GROUPE DE CONFIANCE de l’État pour l’ensemble du personnel UNIGE, afin d’assurer la protection de la personnalité de ses employé-e-x-s.

Le GROUPE DE CONFIANCE est régi par le règlement relatif à la protection de la personnalité à l’État de Genève (RPPers) (B 5 05.10) ; il peut intervenir de façon neutre, impartiale et indépendante pour la résolution de conflits (collectifs et individuels) et lors d’atteintes à la personnalité. Nous considérons que le groupe confiance mis en place par l’UNIGE, qui n’a pas de pouvoir de sanction, représente une mesure insuffisante pour répondre aux différents problèmes de harcèlement sexiste et sexuel qui touchent de nombreuses personnes sexisées. Nous demandons l’instauration d’une instance neutre permettant d’évaluer les cas d’atteinte à la personnalité, habilitée à enquêter et à formuler des propositions, des décisions, des mesures et des sanctions.

  • Instaurer une politique marquée de prévention des risques psycho-sociaux lors d’atteintes à la personnalité (mobbing et harcèlement sexiste et sexuel) et à la santé (pénibilité, risques en cas de grossesses, charge mentale, burn out, etc.). Cette politique doit adopter le point de vue des victimes et appliquer des sanctions efficaces et effectives afin de prévenir la récidive et de maintenir des conditions et un environnement de travail et d’études favorables. Cette communisation doit présenter les actions possibles et leurs modalités au sein de l’UNIGE en dehors des pages internet dédiées. Mettre, par exemple, en place une session informative à chaque rentrée universitaire pour les nouveau-elle-x-s collaborateur-rice-x-s. Garantir l’existence de véritables relais RH. 
  • Mettre en place des réparations concrètes telles qu’une prolongation de contrat ou des délais d’études en cas de harcèlement. Les procédures d’enquêtes doivent être accomplies dans des délais acceptables.
  • Mettre en place des campagnes annuelles de sensibilisation et prévention contre les violences et discriminations sexistes, racistes, LGBTQI+phobes, en lien avec la religion ou validistes, en partenariat avec les associations investies sur ces questions et avec l’octroi d’un budget dédié. S’assurer de l’engagement des facultés.
  • Assurer l’égalité des droits pour les couples et les parents LGBTQI+, indépendamment de la nature légale de l’union
  • Instaurer la possibilité pour toute personne trans* et/ou non-binaire de faire figurer son diplôme et tout document officiel de l’institution son prénom d’usage (en remplacement de son prénom inscrit sur l’état civil), sur simple demande et sans obligation de présenter de certificat ou de document officiel. Centraliser ces procédures d’autodénomination sur le portail UNIGE. 
  • Enlever toute mention du genre (par ex. M./Mme) autant sur les formulaires d’inscription que sur les pages internet (par ex. listes des projets de Bachelor/Master).
  • Dégenrer les toilettes et vestiaires de l’UNIGE tant dans les bâtiments existants que dans les nouveaux bâtiments (voir le dossier en annexe). Garantir l’accessibilité aux toilettes et aux vestiaires à touxtes en changeant l’agencement de l’espace et en ajoutant des lavabos individuels, des miroirs et des poubelles. Garantir l’accès à des produits hygiéniques gratuits et de bonne qualité dans toutes les toilettes. Faire une campagne d’information accompagnant cette démarche.
  • Mettre fin au harcèlement ciblé sur des critères racistes et classistes pratiqués par les agent-e-x-s de sécurité. 
  • Augmenter le budget du service égalité et diversité ainsi que des services et cellules qui s’occupent spécifiquement des questions de genre. Augmenter le poids des commissions de l’égalité dans les facultés.

III. Faciliter la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle

  • Améliorer les conditions de garde de l’enfant-e-x.
    • Prendre des mesures efficaces afin d’augmenter le nombre de places de crèches pour le personnel et les étudiant-e-x-s de l’UNIGE.
    • Garantir un nombre de places suffisant en crèche pour les besoins de garde ponctuels.
    • Introduire un soutien financier ponctuel pour la garde des enfant-e-x-s des étudiant-e-x-s et du personnel de l’Université, lors de moments particuliers des études ou de la carrière (examens, soutenance de thèse, déplacement lors de conférences), en particulier pour les familles monoparentales.
  • Garantir l’égalité devant la parentalité
    • Clarifier et augmenter les droits dans le cadre du congé maternité.
    • Garantir la place et le contenu du poste de travail au retour du congé maternité.
    • Garantir un congé maternité pour les contrats à durée déterminée (CDD) qui se terminent avant la date de l’accouchement et au terme des subsides Doc et Post-doc Mobility.
    • Proposer automatiquement une prolongation du contrat pour toute personne ayant pris un congé dans le cadre de la parentalité (plutôt que de demander aux personnes enceintes d’assumer la démarche).
    • Prolonger proportionnellement et automatiquement la durée des contrats dans les cas de congé maladie précédant l’accouchement ou lié à celui-ci.
  • Garantir l’égalité dans les responsabilités familiales
    • Garantir un congé du parent partenaire obligatoire de 16 semaines minimum rémunéré à 100%.
    • Valoriser la réduction du temps de travail des parents partenaires pour raison d’éducation.
    • Tenir compte dans l’organisation du travail des charges assumées par les proches aidant-e-x-s (care), non rémunérées et effectuées majoritairement par les femmes.

IV. Promouvoir l’égalité dans la recherche et l’enseignement

  • Instaurer la parité à toutes les échelles de l’Université
    • Ajouter des personnes formées et compétentes sur les questions de genre dans les commissions de nomination.
    • Garantir la parité de sièges entre hommes et femmes afin d’assurer une participation équitable dans les organes décisionnels et consultatifs, tels que l’Assemblée de l’Université, la Commission du personnel, les Conseils de Facultés, les Commissions de nomination, les Comités scientifiques, les Commissions de renouvellement des contrats ainsi qu’au sein du Rectorat. Modifier les règlements afin de garantir la représentation paritaire ou a minima proportionnelle.
  • Garantir la présence de 50% de femmes ou de minorités de genre dans les shortlists de processus de nomination (et pas 30%). Relancer l’appel à candidature si ce critère n’est pas rempli. 
  • Rendre obligatoire le langage inclusif (communications orale et écrite) dans toutes les strates de l’université, et plus particulièrement dans le cadre des enseignements (syllabus, emails, pages Moodle).
  • Instaurer des règles claires pour lutter contre les biais de genre et assurer dans les programmes une visibilité équitable de la production scientifique des personnes minorisées (références, bibliographies).
  • Instaurer des modules de formation obligatoires à destination du personnel de la recherche et de l’enseignement, particulièrement des responsables hiérarchiques, concernant les oppressions de genre ou tout autre type de discrimination structurelle, qu’ils peuvent reproduire.
  • Allouer des budgets et des ressources matérielles pour les enseignements portant sur le genre, les sexualités et les discriminations sexistes, racistes, homophobes, transphobes, validistes et classistes dans toutes les facultés.
  • Mettre en place un cours obligatoire dès la première année sur les thématiques citées au point précédent dans tous les cursus.
  • Lutter contre les biais dans l’organisation des conférences, colloques et événements académiques et garantir la mixité de genre dans les comités scientifiques.
  • Supprimer les exigences de mobilité et les restrictions en raison de l’âge académique, qui sont pénalisantes pour les femmes et minorités de genre.
  • Assurer un soutien institutionnel aux carrières duales en offrant une aide à l’insertion professionnelle du/de la partenaire.

Assemblée générale féministe UNIGE