Institut Universitaire de Formation des Enseignants

Des nouvelles de la formation des enseignantes du secondaire genevois…

Qu’est ce que l’IUFE (Institut Universitaire de formation des Enseignants) ? Pourquoi cet institut déchaîne t-il les passions ? Qui sont les responsables des problèmes ? Les institutions ? Certaines personnes ? Sûrement un peu les deux. La CUAE vous propose un petit retour à l’intérieur de cette structure qui forme les futures enseignantes du canton.

L’institut formant les enseignantes tel qu’on le connaît actuellement est issu d’une réforme récente. Avant l’IUFE, les futures enseignantes intégraient l’IFMES : l’Institut de formation des maitres de l’enseignement secondaire. L’institut était alors entièrement géré par le DIP (Département de l’instruction publique). En 2008, Genève fut confrontée à la nécessité d’harmoniser ses programmes d’études, le diplôme de l’IFMES n’étant pas reconnu au niveau national. Le choix concernant la forme que devait revêtir le futur institut s’est alors porté sur une entité universitaire plutôt qu’une HES. La gestion de cette structure a donc aujourd’hui deux têtes, l’Université et le DIP. Ce qui explique notamment sa complexité.

Les débuts de l’institut universitaires ont été poussifs. En effet, de nombreux dysfonctionnements sont apparus : des cours qui changent en cours d’année, une intimidation permanente sur les étudiantes, une gabegie administrative ou encore des cours jugés « infantilisants ». Ces problèmes ont débouchés sur une manifestation en mai 2011 co-organisée par le MEES (mouvement des étudiants en enseignement secondaire) et la CUAE. Celle-ci a réuni plus de 550 apprentis-enseignantes. La direction de l’IUFE s’était alors défendue en invoquant des « problèmes de jeunesse » de l’institution. Cependant aucune solution ne fut concrètement apportée.

Immobilité Universelle Franchement Ecervelée

Les étudiantes qui réussissent les tests absurdes d’admission entrent en première année dans le CCDIDA. Cette formation est principalement théorique et elle se déroule au sein de l’université. En deuxième année, l’étudiante poursuit sa formation dans le deuxième « bloc » nommé MASE à condition d’avoir obtenu au préalable une place de stage. Deux problèmes peuvent être ici identifiés : le nombre de place de stages disponibles et la manière dont sont évaluées les étudiantes.

Concernant les places de stages, c’est le DIP qui devrait définir leur nombre à chaque rentrée. Malheureusement, il semblerait que le DIP ne sait pas mieux prévoir le nombre d’élèves dans ses classes qu’un hérisson ne sait calculer la probabilité de se faire écraser lors d’une traversée d’autoroute. Il est vrai que le nombre de stages dépend du nombre d’élèves inscrites mais ce dernier ne varie durant l’année que sensiblement ; il devrait être assez aisé d’avoir une idée précise et exacte du nombre de stages réellement disponibles. Bien sur le nombre de place de stages qui est attribuée en fin d’année aux meilleurs étudiantes est bien souvent beaucoup plus mince que le nombre estimé en début d’année par l’IUFE. Puis, lors de la rentrée qui suit des places de suppléances[1] sont ouvertes faute de places accordées aux stagiaires.

Prenons un exemple fictif pour mieux comprendre. Anna choisit de commencer sa formation à l’IUFE en septembre 2013. Elle entend que le nombre de place de stages pour septembre 2014 dans sa discipline est de 14. Dans la promotion d’Anna, 22 autres étudiantes se disent qu’elles ont aussi leur chance. Puis en juillet 2014, elles apprennent qu’il n’y a plus que 6 places disponibles. Malheureusement pour Anna, elle se classe neuvième et n’aura donc pas le droit de poursuivre sa formation en MASE. L’été passe, et Anna découvre que plus d’une dizaine de places de suppléance ont été créées en septembre 2014. Anna postule et au vu de son dossier, elle est prise comme suppléante. Ainsi, Anna va enseigner sans pouvoir poursuivre sa formation en MASE et devenir enseignante de plein droit. Encore une fois, c’est l’aspect financier qui prime, et les étudiantes sont pénalisées.

Un autre problème se pose au niveau de l’évaluation des étudiantes. Elle tient une place fondamentale dans le parcours des étudiantes car elle détermine si l’étudiante se trouve parmi les meilleures et peut ou non bénéficier d’un stage. L’évaluation donne lieu à un classement qui est établi par l’IUFE. Les critères de comptage de points sont l’expérience professionnelle, la moyenne obtenue lors du master disciplinaire et de la première année en CCDIDA et surtout une évaluation sur la base d’un entretien variable en durée d’une étudiante à l’autre. Cet entretien est réalisé par deux enseignantes de l’IUFE sans que celles-ci n’aient forcément un lien avec la discipline choisie par l’étudiante. Selon de nombreux témoignages, le but est de tester l’étudiante dans sa capacité à encaisser les coups psychologiques. Sachant que cet entretien compte pour plus de la moitié des points requis, on peut se scandaliser qu’aucune transparence ne soit faite sur sa grille d’évaluation. Si par chance l’étudiante réussit à être dans les meilleures, elle pourra décrocher une place de stage et commencer sa seconde année.

Cet institut est toujours fiévreux, faute des unes et des autres. Il reste cependant la question de la liaison entre le DIP et l’Université. Guerre des égos diront certaines, politique d’austérité diront d’autres. En désespoir de cause, le DIP n’a rien trouvé de mieux que de fermer le CCDIDA pour la rentrée de septembre 2015 sans même en informer l’université ni même consulter les étudiantes. Espérons que la formation d’un groupe de travail du DIP n’aura pas pour effet d’aggraver les problèmes structurels que connait déjà l’IUFE.



[1] Les suppléances sont embauchées par le DIP, mais certaines (exemple de l’école de commerce Aimée-Stitelmann) n’ont pas le même contrat qu’un professeur standard, c’est-à-dire que seules leurs heures effectuées sont payées. C’est donc une belle économie pour le DIP.