L'absolue nécessité du revenu de base [Courants]

Texte paru dans Courants décembre 2006

L’ABSOLUE NÉCESSITÉ DU REVENU DE BASE

Le revenu de base désigne une rente à laquelle a droit – de manière inconditionnelle – tout citoyen ou résident. Le droit à ce revenu est inaliénable et cette mesure financière est versée à tout un chacun indépendamment du titre de séjour, du fait d’avoir travaillé et cotisé dans le passé et de la vérification d’une nécessité. Par ailleurs, d’autres sources de revenus peuvent s’y additionner et aucune contrepartie n’est exigée.

Deux ans après Groenroux1, le comité de la CUAE s’est donné les moyens pour relancer le dossier revenu de base. D’une part, il se doit de donner suite aux décisions issues de ses assemblées générales et d’autre part il s’est rendu compte, dans le contexte politique et social actuel, dans lequel les attaques néolibérales contre les biens communs se généralisent et prennent encore plus d’envergures qu’il y a quelques années2, les conditions matérielles d’existence des étudiant_e_s – surtout de ceux et celles issues de familles les plus fragiles en capital financier – ne cessent de se détériorer3 et la « reproduction sociale » reste d’une flagrante actualité4, que le seul moyen de sortir d’une logique uniquement réactive est de travailler sur un dossier échappant au calendrier politique. Si réagir au coup par coup aux attaques substantielles contre la formation reste certes une tâche incontournable pour un syndicat comme le nôtre, cette approche, outre à s’avérer frustrante sur le moyen-long terme, est politiquement insuffisante en regard des objectifs de la CUAE. S’opposer à toute mesure introduisant davantage de sélection dans le domaine de l’enseignement supérieur reste notre rôle principal; néanmoins, pour que l’autre facette de la mission de la CUAE se réalise, à savoir la promotion d’une vision alternative de la formation supérieure et de la recherche, il est indispensable que parallèlement nous poursuivions un travail de fond dont l’aboutissement sera l’élaboration d’une proposition concrète allant de toute manière à l’encontre de ce qui est aujourd’hui proposé et qui serait le fruit de notre analyse sur la situation actuelle. Comme il l’était déjà dans l’esprit des membres de la CUAE à l’origine des discussions sur l’introduction d’un revenu minimum garanti, le revenu de base reste un sujet pouvant en grande partie se soustraire au contrôle du dispositif bourgeois et par là même nous fournir un instrument de lutte susceptible de déplacer les débats sur un terrain qui est plus propice à la résolution des problèmes avec lesquels notre société est confrontée. L’exigence de l’introduction d’une telle mesure financière est d’autant plus criante après la dernière publication de l’Office Fédéral de la Statistique (2006) sur l’évolution des bourses et prêts d’études cantonaux5 qui ont diminué ces dix dernières années en valeur réelle, alors que par exemple les nouvelles inscriptions dans les Hautes Écoles6 n’ont cessé de croître.

1Pour un aperçu des conclusions provisoires émergées lors des discussions à Groenroux (avril 2004) on lira le n°28 de Regard Critique à disposition sur le site internet de la CUAE à l’adresse: http://www.asso-etud.unige.ch/cuae/spip.php?article21

2Le dernier en ordre chronologique, l’adoption par le champ politique des articles constitutionnels sur la formation. On trouveras les modifications constitutionnelles (FF 2005 6793) sur le site web de la Confédération à l’adresse: https://www.admin.ch/opc/fr/federal-gazette/2005/index_51.html

3Nous pensons au développement des « mac-jobs », à la « crise du logement » qui sévit par exemple Genève, etc.

4Pour un aperçu on consultera les statistiques réalisées par l’Office Fédéral de la Statistique (2005) sur l’Origine sociale des étudiants HE à l’adresse: http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15/06/key/ind12.approach.1201.html. Bien que méthodologiquement discutables, ces données montrent néanmoins que la probabilité de suivre une formation au sein d’une université ou d’une école polytechnique fédérale est inégalement distribuée si l’on compare un étudiant dont un parent au moins a suivi ce type d’enseignement avec un autre étudiant dont aucun parent ne l’a suivi.

5Vous pouvez télécharger l’intégralité du rapport sur le site internet de l’OFS à l’adresse suivante: http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15/22/publ.html?publicationID=2457

6La catégorie des « Hautes Écoles » comprend: les Universités, les deux Écoles Polytechniques Fédérales, les Hautes Écoles Spécialisées et les Haute Écoles Pédagogiques.

L’assemblée générale de la CUAE du 22 novembre 2006 a donc adopté la déclaration d’intentions suivante:

DÉCLARATION DE SAIGNELÉGIER

18-20 août 2006

Considérant que toute mesure financière réduisant l’inégalité de la redistribution du capital économique est une condition nécessaire, bien que non suffisante, à la construction d’une alternative à la vision capitaliste de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique;

Considérant le résultat de l’action directe dite « La Fin du Droit »;

La CUAE, dans le cadre des attaques néolibérales contre l’éducation supérieure, promeut le Revenu de Base comme un moyen contribuant à atteindre des contenus et des organisations des enseignements et des recherches alternatifs à la vision capitaliste.

De plus, elle mènera une étude approfondie sur les régularités statistiques qui caractérisent le tissu social en se concentrant plus particulièrement sur les effets de la distribution inégale des capitaux économiques, culturels et symboliques parmi les personnes en formation.

Par ailleurs, face à la vision dominante de l’enseignement, elle soutiendra par tous les moyens qu’elle estimera adéquats toutes les initiatives promouvant l’instauration d’un Revenu de Base susceptible de réduire les inégalités matérielles.

Dans le cadre de ses actions, la CUAE se procurera les outils nécessaires à la réalisation de ses objectifs.