Prise de position de la CUAE sur les examens de janvier

Les examens en temps de pandémie ne sont pas une mince affaire. Lors des dernières sessions, on a fait l’expérience des conditions déplorables des exas en ligne: qui a oublié les 30 secondes pour répondre à une question, l’impossibilité de retour en arrière, les points négatifs, les bugs de wifi et, cerise sur le gâteau, la surveillance par zoom ou par testwe? Voilà pourquoi nos cœurs se sont initialement gonflés de joie lorsque l’on a appris que la session de janvier se déroulerait en présentiel. Après plus d’un an et demi de crise sanitaire, ça semblait rimer avec un semblant de retour à l’avant-pandémie. Le rectorat avait d’abord annoncé une capacité à 2/3 des salles d’examens afin de limiter les risques de contamination. Lundi, le conseil fédéral ayant adopté de nouvelles mesures, le rectorat a annoncé que l’accès aux examens en présentiel nécessiterait la présentation d’un passe sanitaire. Plus le temps avance et plus la situation sanitaire se (re)déteriore, plus nous sommes critiques avec la façon dont cette pandémie est gérée. Les mesures pour restreindre la circulation du virus prises par le rectorat pour la prochaine session d’examens ne nous semblent ni adéquates, ni suffisantes.


Nous ne réclamons cependant pas des examens en ligne : certes, ils ont un avantage sanitaire certain que nous reconnaissons. Cependant, trop de désavantages leur sont liés. Tout d’abord, ils engendrent de trop grandes disparités entre les étudiant.e.x.s et empêchent beaucoup d’entre nous de passer les examens sereinement. Comment faire pour celleux qui n’ont pas un environnement calme et silencieux ? Comment assurer à tou.te.x.s une connexion Internet stable ? Ensuite, puisque les professeur.e.x.s disposent d’une grande marge de manoeuvre pour fixer les modalités des examens, celles-ci sont souvent délétères car elles provoquent une angoisse et un stress accrus.


Comme nous l’avons déjà dit par le passé, “[l]a CUAE a toujours été partisane du présentiel, et s’oppose à une numérisation marchande et sans réflexion pour l’encadrer. Bien que le numérique puisse apporter certains outils pédagogiques pertinents à l’université, les dynamiques marchandes et néolibérales sont étroitement liées au processus de numérisation qui a lieu au sein de l’université.” (Vers le dépassement du débat distanciel/présentiel – 22 avril 2021). On en a eu une preuve formelle lors des dernières sessions d’examens avec l’usage du logiciel testwe, développé par une  entreprise privée néomanagériale qui cherche à dématérialiser et déshumaniser les processus d’évaluation afin d’encore plus accélérer l’austérité en cours dans nos formations. Avec une conséquence simple et terrible : détériorer inlassablement nos conditions d’études. Mettre en place de pareilles possibilités délétères dans une situation de crise sanitaire n’est rien d’autre qu’une porte ouverte vers de futurs abus. Même si retourner passer ses examens en présentiel fait peur à beaucoup d’entre nous qui n’avons pas ou peu connu des examens “papier”, les examens en ligne présentent trop d’inconvénients au court terme et au long terme pour être une solution (en)viable. 


D’autant que nous sommes convaincu.e.x.s qu’il est possible de passer des examens en présentiel dans des conditions sanitaires soutenables. Mais pour cela, il faut concevoir une session d’examens pas comme les autres. Cela nécessite une volonté politique ferme de garantir à la fois la sécurité sanitaire de toute.e.x.s (en particulier des personnes à risques) et une tenue des examens favorables à tou.te.x.s. Nous demandons donc à l’université de mettre massivement des tests à la disposition de sa population pendant toute la durée des examens. Au vu de la fiabilité réduite des tests antigéniques pour les personnes vaccinées, nous affirmons la nécessité de mettre en place des tests PCR à grande échelle, avec des résultats obtenus dans des délais convenables. A cela s’ajouteraient bien évidemment toutes les mesures sanitaires habituelles, à savoir la distanciation physique, le port du masque, une désinfection régulière (des mains et des surfaces) et une aération maximale des salles d’examens. Ces conditions permettraient réellement à beaucoup d’entre nous de se rendre plus sereinement à nos examens. Il s’agirait également d’une occasion en or pour casser les chaînes de transmission du virus parmi la population universitaire en cette période saturée par le COVID. L’université remplirait ainsi son rôle minimal de responsabilité sanitaire envers les étudiant.e.x.s et la société. 


Pour les personnes qui seraient malades et/ou en quarantaine pendant la session d’examens, nous demandons qu’une session supplémentaire soit agendée avant la rentrée de février afin qu’elles puissent passer leurs examens dans des conditions sanitaires soutenables sans accumuler de retard dans leurs études. Chose à laquelle le rectorat devrait porter une attention toute particulière s’il veut (comme il le prétend) garantir un semblant d’égalité d’accès à la formation et d’égalité des chances. En effet, pour beaucoup d’étudiant.e.x.s (encore et toujours les plus précaires), devoir rester une année de plus à l’université aurait des conséquences déplorables.Nous pensons que cette session différée est primordiale et doit être mise en place à tout prix, quitte à rallonger les vacances et à commencer le semestre plus tard. Cette session extraordinaire ne doit pas compter comme un rattrapage et les personnes qui sont dans l’incapacité de passer leurs examens aux dates initialement prévues doivent disposer de deux tentatives, comme tout le monde. 


Nous ne voulons sacrifier ni notre santé et notre sécurité, ni nos conditions d’examens et d’études. En cette période particulièrement angoissante, l’université se doit de prendre des mesures sanitaires adéquates et efficaces ainsi que de mettre en place des modalités d’examens qui prennent en compte la situation exceptionnelle et qui permettent de suivre sereinement ces derniers. Gérer une situation pandémique catastrophique sans y voir une occasion supplémentaire pour attaquer les conditions d’études de tou.te.x.s demande une autre manière de concevoir les examens, des moyens extraordinaires et une volonté politique tenace. Après bientôt deux ans de crise sanitaire et sociale, il est temps que l’université le comprenne.