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Les arguments "pragmatiques" pour la gratuité des études

Au-delà d’une revendication romantique qui nie la légitimité d’une marchandisation du savoir au nom de la qualité universelle des connaissances [ref]Revendication que nous assumons par ailleurs pleinement, à ce titre lire « Les fondements moraux de la gratuité des études. »[/ref], il existe un nombre important d’arguments justifiant la gratuité de l’enseignement supérieur. Que l’on se fonde sur des principes d’égalité des chances, de droits de l’Homme ou d’économie, la gratuité des études apparaît comme une nécessité. Il ne faut cependant pas dissimuler les problèmes de financement, et donc de justice sociale, que posent une telle proposition. Alors que nous reposons la question de l’abolition des taxes universitaires dans l’arène politique, il est essentiel de rappeler tous les arguments en faveurs de cette mesure et de revenir sur les interrogations qu’elle suscite.

Tendre vers de l’égalité des chances

L’égalité des chances constitue l’un des principes fondamentaux sur lequel repose nos démocraties. Or, toutes les statistiques le montrent [ref]Par exemple : « Origine sociale des étudiants des Hautes Ecoles Universitaires » sur le site de l’Office fédéral de la statistique http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15.html[/ref], les chances d’accès à l’enseignement supérieur varient de manière très importante en fonction de l’origine sociale. Les chances d’accéder à l’université sont largement inférieures pour celles et ceux dont les parents n’ont pas fait d’étude et/ou ont des revenus modestes. Les taxes d’étude ne sont évidemment pas responsables à elles seules de ce phénomène. Néanmoins, elles y participent à deux niveaux au moins. Premièrement, elles compliquent matériellement la vie des étudiant.e.s et en particuliers de celles et ceux dont la situation économique est la plus précaire. Nous estimons [ref]D’après les chiffres du Bureau d’information sociale http://www.unige.ch/dase/buis/vieageneve/budget.html[/ref] que les taxes actuelles [ref]1000 francs par an.[/ref] représentent environ 5% du budget étudiant moyen, et près de 10% du revenu disponible [ref]Le revenu disponible définit dans le cadre de l’aide sociale représente le revenu qui doit couvrir toutes les dépenses une fois le loyer et les assurances maladies payées.[/ref]. Elles pèsent donc lourdement sur les finances estudiantines [ref]Elles frappent particulièrement les étudiant.e.s dont les parents ont des revenus juste supérieurs au barème d’exonération et ceux qui sont en rupture avec leurs parents.[/ref]. Une telle barrière a de quoi décourager une part non négligeable des jeunes issu.e.s des classes populaires. Les frais d’écolage obligent également une partie des étudiant.e.s à travailler (ou à travailler plus) parallèlement à leurs études, ce qui augmente l’échec scolaire et les contraint à prolonger leurs études. La gratuité permet l’allégement des frais liés aux études et favorise donc l’accès de tou.te.s à l’enseignement supérieur. Deuxièmement, les taxes constituent une barrière symbolique. Elles rappellent symboliquement que les études coûtent, qu’elles ne sont accessibles qu’à celles et ceux qui en ont les moyens. Or, une part importante de la sélection sociale quant à l’accès à l’université s’opère au niveau des représentations [ref]En rendant les études payantes, on augmente le nombre de jeunes des classes populaires qui se disent : « les études, ce n’est pas fait pour moi ». BOURDIEU, « Les héritiers. Les étudiants et la culture », en collaboration avec PASSERON, 1964. Et aussi BOURDIEU, « La reproduction, éléments pour une théorie du système d’enseignement », en collaboration avec PASSERON, 1970.[/ref]. Réintroduire la gratuité permet de réaffirmer que l’université est accessible à tou.te.s. Il ressort alors que les taxes constituent, tant par leur poids matériel concret que par leurs effets symboliques, une entrave à l’égalité des chances qu’il convient d’abolir.

La gratuité des études : un droit de l’Homme

Le principe de gratuité des études supérieures n’est d’ailleurs pas une simple obligation morale, c’est un droit de l’Homme que la Suisse se doit 6.de respecter. L’article 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels [ref]Ratifié par la Suisse le 18 juin 1992.[/ref], qui est en matière d’éducation « la norme du droit international relatif aux droits de l’homme la plus large par sa portée et la plus détaillée » [ref]Nations Unies, Conseil économique et social, « le droit à l’éducation », Application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale 13, Paragraphe 2.[/ref], est très clair à ce sujet. Il stipule que « l’enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l’instauration progressive de la gratuité ». L’application de ce droit est commentée de manière très explicite par les instances onusiennes : « Gratuité. La nature de cette exigence ne souffre aucune équivoque. Ce droit est formulé explicitement pour bien indiquer que l’enseignement (…) ne doit être à la charge ni des enfants, ni des parents, ni des tuteurs. Les frais d’inscription imposés par le Gouvernement, les collectivités locales ou les établissements scolaires, et d’autres frais directs, sont un frein à l’exercice du droit et risquent de nuire à sa réalisation. Ils entraînent aussi souvent un net recul de ce droit. Le plan exigé doit tendre à leur suppression. » [ref]Nations Unies, Conseil économique et social, Questions de fond au regard de la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale 11, Paragraphe 7.[/ref]. Il ressort alors que la gratuité ne forme pas une revendication idéologique abstraite mais un droit concret qu’il convient d’appliquer.

La gratuité : un choix économique rationnel !!!

Même s’il l’on s’inscrit dans une logique d’économie capitaliste (qui n’est pas la nôtre [ref]Il semble important de préciser l’un des buts statutaires de la CUAE est de « promouvoir une vision alternative à la vision capitaliste de l’éducation et de la recherche scientifique. »[/ref]), la gratuité s’avère, là encore, être un choix rationnel. Soulignons pour commencer que les taxes universitaires ne contribuent que de manière extrêmement marginale au budget de l’université. En 2007, elles ne représentaient que 2,7% [ref]D’après les comptes d’exploitation des statistiques universitaires de 2004-2005.[/ref] des revenus de l’alma mater. Ce chiffre doit être mis en comparaison avec la part importante (près de 10% du revenu disponible) que les taxes représentent dans les dépenses des étudiant.e.s. Cette première approche permet de montrer que ces taxes n’apportent que relativement peu d’argent à l’université alors qu’elles pèsent lourdement sur les finances estudiantines. De ce fait, nous l’avons vu, elles contribuent à entraver l’accès à l’université. Or, l’économie genevoise souffre d’un grave manque de personnel qualifié et très qualifié. Pour maintenir voire améliorer « notre » [ref]Il s’agit plutôt de la compétitivité des possesseurs des moyens de production dans l’économie globalisée, d’où les guillemets puisque la plupart d’entre-nous ne faisons pas partie de cette catégorie.[/ref] compétitivité (concept cher aux économistes), il faut rendre les études supérieures accessibles au plus grand nombre pour pallier cette pénurie. Dans ce but, il faut former au mieux le maximum de personnes afin d’augmenter la masse de travail à forte valeur ajoutée et ainsi conserver l’attractivité du pôle économique genevois. L’argent dépensé pour former ces personnes supplémentaires doit être considéré comme un investissement extrêmement rentable à moyen terme. Nous sommes même convaincu que la gratuité ne suffit pas et qu’il faut, en plus, développer le système de bourses afin de renforcer son efficacité. Abolir les taxes constitue donc un investissement rentable qu’il est nécessaire d’introduire.

Subventionner la reproduction des inégalités ?

La gratuité des études doit nécessairement être compensée par une augmentation de la subvention publique afin de ne pas entraver la qualité de l’enseignement et de la recherche. Cela pose un problème de justice sociale dans la mesure où l’université est financée par l’ensemble de la population pour finalement ne profiter majoritairement qu’à des individus d’origine sociale dominante et dont le passage à l’université garantit la reproduction de leur domination en offrant à leur travail une valeur ajoutée importante sur le marché (de par leur titre universitaire). Autrement dit, ne serait-il pas normal que les riches payent pour un service qui leur permettra de s’enrichir ?

Il nous semble effectivement essentiel que les personnes qui bénéficient d’une formation universitaire, et qui de ce fait touchent des salaires importants, contribuent largement au financement de l’institution. Cependant, il nous semble que la mesure la plus appropriée et la plus juste (en terme de justice sociale) soit l’impôt progressif sur le revenu. Au moins deux arguments justifient cette position. D’une part, tout autre système de financement direct sous forme de taxes, même avec des possibilités de prêts, exclut de fait une partie importante des classes populaires, en particulier par l’effet de barrière symbolique que créent de telles mesures. Les frais de scolarité tendent à conserver le caractère élitiste des études universitaires alors que la gratuité pousse, au contraire, vers la démocratisation de la formation tertiaire. D’autres part, une partie importante des études universitaires n’offre pas une orientation particulièrement rentable des formations. C’est le cas notamment des sciences humaines mais également de certaines sciences dures. Les taxes dévalorisent les filières peu rentables et restreignent ainsi le choix des filières d’étude. L’impôt progressif sur le revenu en revanche ne touche que ceux qui bénéficient effectivement de leur formation pour obtenir des revenus importants. Il nous semble donc qu’en terme de justice sociale, la mesure la plus appropriée pour financer les 11 millions (soit environ 0,15% du budget de l’Etat) que coûteraient l’abolition des taxes passe par une augmentation progressive de l’impôt sur le revenu pour les catégories de la population les plus riches.

La formation universitaire représente également un coût externe pour les entreprises. Autrement dit, celles-ci bénéficient de personnes formées par l’Etat, il est donc normal qu’une partie de ce coût soit pris en charge par les entreprises. Augmenter très légèrement les impôts sur les entreprises peut donc également être une solution envisageable.

Le financement de l’université doit donc se faire par les pouvoirs publics afin de garantir un accès aussi large que possible à l’université. Suivant cet objectif, la gratuité est non seulement une nécessité morale mais également un droit garanti par les conventions internationales et une mesure économique rationnelle. Le financement des études doit également répondre à l’exigence de justice sociale et le coût de cette formation doit reposer sur ceux qui en profitent. Là aussi, la gratuité est une mesure qui permet d’atteindre ce but de manière optimale, à condition toutefois de mener une politique fiscale cohérente. La gratuité des études est une mesure pragmatique qui doit être largement et vigoureusement promue.

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Lancement de l’initiative "Pour la démocratisation de l’Université"

Communiqué de presse – 20 novembre 2007

Genève, le 20 novembre 2007

La CUAE – syndicat étudiant de l’Université de Genève – lance aujourd’hui son initiative populaire cantonale « Pour la démocratisation de l’Université », en collaboration avec des membres du corps intermédiaire. Cette démarche vise la concrétisation des différentes propositions émises dans le cadre de la consultation concernant la révision de la loi sur l’Université. Notre initiative réitère et renforce deux principes inaliénables: celui d’une université démocratique et accessible, et celui de la stabilité des contrats et de la
qualité des conditions de travail des personnes qui assurent le fonctionnement de l’université.
La pseudocrise de l’Université de Genève du printemps 2006 a débouché sur la désignation par le Conseil d’État d’une commission d’« experts » placée sous la présidence de Ruth Dreifuss.
Les conclusions de cette commission ont abouti sans surprise à un avant-projet de loi proposant une vision néolibérale et hiérarchique de l’Université, débouchant à court ou moyen terme sur:

  • une augmentation massive des taxes pour les étudiantes;
  • une discrimination accentuée des étudiantes migrantes;
  • la destruction sournoise des structures participatives (qui n’ont été maintenues formellement que pour être mieux vidées de leur substance);
  • un désengagement progressif de l’État dans le financement des activités de l’université;
  • la flexibilisation et la précarisation du personnel qui travaille à l’université (actuellement certains membres du corps intermédiaire et du personnel administratif et technique touchent un salaire les plaçant au dessous du seuil de pauvreté (!) alors que parallèlement on envisage de porter à 150 % le salaire de certains professeures, pourtant déjà grassement rémunérés).

En revanche, la commission externe s’est bien gardée de résoudre aucun des problèmes soulevés lors de la « crise ». En particulier, la rétrocession des gains accessoires est laissée à la libre appréciation de l’Université. Cette disposition prête à sourire pour quiconque connaît l’écrasante domination du corps professoral dans les structures décisionnelles.

Malgré l’absence de réelle consultation de la part des différentes
acteurtricespolitiques (consultation de la commission sous forme de relations publiques, puis consultation du Conseil d’État dans un délai
inexplicablement court et placée sous le contrôle du rectorat de l’Université !), une importante mobilisation regroupant tous les corps de l’Université a eu lieu. Différentes propositions ont alors été formulées par un groupe de travail ad hoc (GTLU), que notre initiative reprend pour en concrétiser la substance.

L’initiative se compose de trois volets principaux :

  • l’accès à l’Université, notamment via la gratuité des études;
  • l’instauration d’une véritable démocratie interne;
  • les conditions de travail du personnel.

La gratuité des études est une condition nécessaire, bien qu’insuffisante, de toute tentative de démocratisation d’accès aux études supérieurs. Si les taxes ne constituent pas, et de loin, la seule restriction d’accès à l’Université, leur abolition constitue un premier pas indispensable, qui doit être complété par un système de bourses (i.e. allocations d’études) en adéquation avec la réalité des études universitaires (i.e. le coût de la vie), par la suppression de toute forme de numerus clausus et des obstacles administratifs entravant
l’accès aux étudiantes non porteusers de maturité.

Afin de régler les problèmes structurels récurrents de l’Université, il est essentiel que les prérogatives décisionnelles soient attribuées à des instances participatives et paritaires élues démocratiquement et rassemblant les quatre corps de l’Université (étudiantes,
corps intermédiaire, personnel administratif et technique et corps professoral). Aux antipodes du modèle d’un rectorat fort voulu par les réformes successives depuis les années 90 (malgré des échecs répétés et la trop grande fragilité d’un système concentrant les responsabilités sur quelques personnalités) la réaffirmation et le renforcement de l’organisation démocratique s’avère indispensable pour assurer un large contrôle par la base des activités de l’Université.

Enfin, la stabilité des contrats et de bonnes conditions de travail sont seules à même de garantir l’indépendance et la continuité de la recherche académique sur le long terme. La qualité de l’encadrement des étudiantes est également directement liée aux conditions de travail du personnel enseignant. Il est aussi primordial d’assurer les conditions de travail de la fonction publique au personnel administratif et technique, garant du bon fonctionnement de l’Université.

Ces conditions doivent naturellement s’appliquer à toutes les institutions délivrant des formations de type universitaire sur le territoire genevois, afin d’éviter que ne se répètent des situations telles que celle de l’Institut des Hautes Études Internationales, qui viole la loi sur l’Université en fixant des taxes d’études à 1500 francs et plus par semestre.

La CUAE se réjouit d’apporter avec cette initiative sa contribution au débat nécessaire sur la loi sur l’Université. Les solutions proposées, novatrices mais pragmatiques, vont à l’encontre de celles proposées jusqu’ici et qui constituaient de simples reprises des mesures déjà mises en oeuvre depuis plusieurs années et ayant largement prouvé leur inefficacité pour une bonne gouvernance de l’Université. Nous ambitionnons au contraire de donner par notre initiative une solution durable, efficace car démocratique, aux difficiles questions de l’accès et de la structure de l’enseignement supérieur.

Texte de l’Initiative populaire
«Pour la démocratisation de l’université»

La Conférence universitaire des associations d’étudiantEs, Collectif pour la démocratisation des études**, soutient le lancement de l’initiative populaire cantonale intitulée “Pour la démocratisation de l’université”.

Les citoyennes et citoyens soussignés, électrices et électeurs dans le canton de Genève, en vertu des articles 64 et 65A de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 93 de la loi sur l’exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, appuient la présente initiative non formulée qui demande au Grand Conseil de légiférer aux fins de démocratiser l’Université notamment en modifiant les dispositions relatives à :

1. Accès à l’université

Une université démocratique doit être accessible au plus grand nombre sans restriction, notamment d’ordre financier. Dans ce but, les études universitaires doivent être gratuites.

2. Démocratie interne

L’université s’organise selon les principes démocratiques de la représentation et de la séparation des pouvoirs. L’organe suprême de l’université est une assemblée législative dans laquelle les quatre corps siègent de façon paritaire.

3. Statut du personnel

L’Etat garantit la qualité des conditions de travail et la stabilité des contrats de travail des personnes qui travaillent à l’université et qui en assurent le fonctionnement.

4. Champ d’application

Afin de garantir l’application de ces dispositions, toutes les institutions délivrant des formations de type universitaire sur le territoire genevois et recevant des subventions cantonales doivent y être soumises.

(*) Echéance du délai de récolte des signatures: 7 avril 2008.


Exposé des motifs

La qualité de l’enseignement et de la recherche à l’Université de Genève est reconnue au niveau national comme international. Le maintien de cette qualité dans le futur dépend d’une véritable application des principes démocratiques qui sont à la base de son activité, soient l’accessibilité garantie aux étudiants, la qualité et la stabilité de l’encadrement et le haut degré de participation interne. Ce sont précisément ces valeurs fortes que la présente initiative veut réaffirmer et renforcer.

Taxes universitaires

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, élaboré sous l’égide de l’UNESCO et ratifié par la Suisse, garantit l’accès à l’enseignement supérieur à chacun en fonction de ses capacités. A cette fin, les États parties s’engagent à instaurer la gratuité des études.

Les taxes ne représentent actuellement qu’un montant de 12 millions sur les 627 du budget de l’Université de Genève. En revanche, les 1000 francs à débourser pèsent lourd sur le budget de la majorité des étudiant-e-s, qui travaillent pour financer leurs études. L’Université se doit de favoriser l’intégration des diverses catégories sociales, et de garantir l’égalité d’accès aux études. La suppression des taxes universitaires constitue à cet égard un premier pas modeste, nécessaire bien qu’insuffisant.

Statut du personnel

Une université démocratique est un établissement assurant un taux d’encadrement propice aux apprentissages tout en garantissant la qualité des conditions de travail et la stabilité des contrats de toutes les personnes qui y collaborent. En ce sens, il est crucial que les membres du corps intermédiaire bénéficient de conditions favorables à la réalisation de leur thèse et que le personnel administratif et technique ne voie pas son statut et son activité régulièrement remis en discussion.

Démocratie interne

Une forte participation des quatre corps de l’Université (personnel administratif et technique, étudiant-e-s, corps intermédiaire et professeur-e-s) est également indispensable à son bon fonctionnement. Les décisions doivent donc être prises à tous les niveaux (filières d’études, facultés et niveau central) par des conseils élus au suffrage universel direct au sein de l’Université, et avec une représentation paritaire des quatre corps. Ils doivent en particulier être compétents sur les points suivants : budget et comptes, création, transformation et suppression de filières, élection des membres des commissions, du rectorat et des décanats, ratification des accords avec d’autres institutions ou avec le secteur privé, règlements, plans d’études et nomination du corps enseignant.

Le passage par les différents conseils participatifs garantit une plus forte légitimité aux décisions prises. Afin de ne pas surcharger les conseils et de ne pas ralentir les procédures, il est souhaitable que ceux-ci puissent déléguer les décisions de peu d’importance à des commissions ou aux organes exécutifs.

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Projet de Loi sur l’Université : Communiqué de presse de la rentrée

A l’occasion de la rentrée universitaire, la CUAE ‒ syndicat étudiant de l’Université de Genève ‒ entend réaffirmer ses priorités pour la défense des intérêts des étudiantEs, en particulier en ce qui concerne les enjeux liés au projet de loi sur l’Université déposé récemment par le Conseil d’État.

Il faut tout d’abord se féliciter de la réinscription dans la loi d’un contrôle démocratique sur les taxes universitaires, résultat du réel effort de mobilisation de la part des étudiantEs. Manifestement, la menace de référendum de la part du milieu étudiant a été prise au sérieux, et le gouvernement a préféré déléguer à une « loi spéciale » la délicate question des taxes, faisant ainsi l’économie d’un débat de fond sur le sujet. Cette manœuvre n’a pas d’autre raison que d’assurer l’adoption du projet de loi pour revenir ultérieurement à la charge sur la question des taxes. La CUAE sera de toute manière extrêmement attentive au contenu de cette prochaine loi. Nous ne laisserons pas les études et la recherche académique aux dogmes de la concurrence propre au monde économique. Nous réaffirmons à cette occasion notre opposition de principe à toute forme de restriction à l’accès aux études, en particulier sous la forme de taxes.

Malheureusement, si la question des taxes, médiatique et mobilisatrice, a fait l’objet d’un traitement particulier de la part du Conseil d’État, le reste du projet reste pratiquement inchangé. Ce qui nous est vendu à travers ce projet de loi, c’est une entreprise d’éducation supérieure dirigée par un manager. Deux points nous semblent particulièrement problématiques :

Le projet de loi propose de centraliser le pouvoir au sein du rectorat. Les organes consultatifs perdant les faibles prérogatives qui leur étaient attribués : dorénavant, même la création ou suppression d’une faculté n’aura plus besoin de leur aval. La seule forme de contre-pouvoir au recteur est une hypothétique révocation par le Conseil d’État. La CUAE réaffirme son opposition au principe même du rectorat fort, opposition d’ailleurs largement partagée dans les autres corps de l’Université : personnel administratif et technique, corps intermédiaire et corps professoral.

La composition de l’Assemblée de l’Université est déséquilibrée par la sur-représentation du corps professoral. La CUAE exige un véritable Conseil de l’Université représentatif et paritaire. Il est également nécessaire qu’il ait de réelles attributions, en particulier d’un droit d’initiative sur les règlements internes de l’Université, sans quoi il se verra réduit à une simple chambre d’enregistrement des décisions du rectorat. Il doit également avoir des compétences étendues en matière de nominations et de budget.

Enfin, il serait bon que le Conseil d’État cesse de présenter cette loi et la procédure d’urgence quasi plébiscitaire qui l’accompagne comme une conséquence de la (pseudo) « crise universitaire de l’année 2006 ». Ou alors qu’il explique pourquoi il n’a réglé aucun des problèmes relevés à cette époque, à savoir la production de faux (déjà poursuivie pénalement) et la non-rétrocession des gains accessoires (laissée à la discrétion de l’Université… Belle marque de confiance, qu’hélas rien ne justifie !)

Le seul moyen d’avoir une université efficace, qui réponde aux aspirations de la science et de la cité et dont le fonctionnement est contrôlé, est d’instaurer une véritable participation de touTEs grâce à des organes démocratiques dotés de pouvoirs décisionnels importants.

La CUAE reste complètement opposée au projet de loi présenté par le Conseil d’État. Elle mettra toute son énergie et tous ses moyens (parmi lesquels, si cela s’avère nécessaire, la mise en application des possibilités offertes par notre démocratie directe) pour lutter contre ce projet de loi et promouvoir une université publique, démocratique et accessible.

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Réponse à l'article de Pierre Weiss (Le Temps, 22 mai 2007)

Vous trouvez ici la version intégrale de la réponse à Weiss que Le Temps a quasi entièrement reprise (sauf le premier paragraphe) dans son édition du 31 mai.

Avant-projet de loi sur l’Université : réponse au député libéral et quasi-professeur Pierre Weiss

Monsieur le député, nous vous accusons face à l’avenir, non pas uniquement par rapport à vos propos politiques élitistes et discriminatoires bien connus en matière d’éducation, mais surtout – et puisque vous dispensez des cours à l’Université c’est inacceptable – quant à la manipulation informative dont vous faites preuve et du mépris manifeste des principes démocratiques.

Dans votre article paru dans l’édition de Le Temps du 22 mai dernier, vous annoncez haut et fort que l’avant-projet de loi instaure un rectorat faible, « soumis » au prétendu joug d’un tout aussi prétendu contre-pouvoir. Citer les seules prérogatives dont dispose l’assemblée de l’université sans exposer celles du rectorat (i.e. les nominations du personnel, l’élaboration du règlement interne de l’UNI, la négociation du budget avec le gouvernement genevois, etc.) donne une vision quasi-utopique et surtout trompeuse de la réelle répartition du pouvoir au sein de l’Université conçue par l’avant-projet.

De plus, en vous appuyant sur des arguments qui ne résistent pas à l’épreuve des faits, vous insinuez que la plupart des membres de la communauté universitaire – le personnel administratif et technique et les étudiants (sans qui l’Université n’existerait même pas !, voilà la nécessité que vous recherchiez à leur participation) – ne devrait pas avoir à s’exprimer sur l’avenir de l’Université et des conditions propres de travail ou d’études.

Monsieur le député, voulez-vous transposez le modèle entrepreneuriale dans le champ universitaire afin que votre expérience professionnelle y soit enfin légitimée et matériellement valorisée ? Voudriez-vous nous faire comprendre que l’organisation et le fonctionnement de l’université à laquelle vous aspirez devrait renforcer davantage l’oligarchie professorale ?

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Loi sur l'université: Recommandations du GTLU

Vous trouverez ci-dessous  les pistes de réflexion quant à la résolution des réels problèmes que rencontre notre Université élaborées par le groupe de travail interne sur la loi sur l’Université (GTLU) et qu’il adressera au Grand Conseil genevois sous forme de recommandations.

Le GTLU rassemble des membres des quatre corps de l’institution et des différentes facultés.

[pdf http://www.cuae.ch/v2/wp-content/uploads/2011/03/recommandations-GTLU-20070424.pdf]

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Contribution à la réflexion sur le syndicalisme étudiant au Festival de solidarité internationale de "luttes étudiantes", 11-14 avril 2007

Le revenu de base comme réponse offensive à la dégradation de la situation sociale des étudiantes et à la destruction du système des bourses

La situation sociale des étudiantes en Suisse est en régression constante. La majorité des étudiantes en fin d’études (82 %) [1] ont un travail rémunéré en parallèle à leurs études. Ce travail est estimé absolument nécessaire financièrement pour 57 % d’entre eux. Les difficultés posées par l’introduction du processus de Bologne sont nombreuses, puisqu’elles généralisent les études à plein temps et raccourcissent les délais d’études de façon drastique. Cette situation est naturellement à mettre en parallèle avec la diminution du financement public attribué aux bourses. Cette diminution peut également être mise en lien avec la baisse du financement public pour l’université en général, entre autres l’encadrement. En Suisse, l’Office fédéral de la Statistique [2] indique que les montants consacrés aux bourses sont en stagnation sur la période 1995-2005, ce qui correspond à une baisse de 9 % si l’on tient compte de l’inflation sur cette même période. En outre, ces chiffres ne tiennent pas compte de l’augmentation du nombre d’étudiants (16 % depuis 1990), ni des importantes différences de traitement dues au système fédéraliste (la dépense consacrée aux bourses par habitant pouvant varier dans une proportion de un à cinq selon les cantons). On peut ajouter à cela la tendance à remplacer les allocations par des prêts remboursables, certains cantons ne délivrant plus du tout d’allocation. Enfin, l’augmentation des taxes universitaires constitue la dernière attaque contre toute volonté de démocratisation des études. A Genève, les taxes sont actuellement fixées à 500 francs par semestre. Différents projets ont pour but de les augmenter, de façon généralisée ou en discriminant les étudiantes étrangères [3].

Dans ce contexte, les revendications traditionnelles telles que la gratuité des études et l’augmentation des bourses d’études (à la fois en nombre et en montant) nous apparaît comme insuffisante. L’instauration d’un véritable revenu pour les étudiantes est donc une priorité. Mais conscients que la précarité frappe des couches toujours plus importantes de la société, il nous semble incohérent de limiter ce revenu aux seules étudiantes. C’est pourquoi la CUAE souhaite que le financement des études prenne la forme d’une revenu de base généralisé et inconditionnel. Le revenu de base, ou allocation universelle, consiste en le versement à toute personne d’un montant suffisant à couvrir ses besoins élémentaires, de façon inconditionnelle, c’est-à-dire sans critère discriminant ni prestation en retour, que ce soit sous forme de travail ou autre. Il remplacerait, en tout ou en partie, certaines prestations sociales actuelles. L’institution d’un tel revenu implique la reconnaissance que l’existence sociale d’une personne n’est pas liée au travail rémunéré qu’elle fournit. En ce qui concerne les revendications spécifiquement étudiantes, le revenu de base est un pas important vers une réelle démocratisation des études supérieures. Les discriminations sur des critères socio-économiques sont actuellement importantes [4]. Ainsi, 42 % des étudiantes de Suisse ont un parent au moins ayant achevé des études supérieures, contre seulement 9 % ayant uniquement la formation obligatoire [5] , alors que ces deux catégories représentent respectivement 11 % et 21 % de la population totale. Le revenu de base apporte l’assurance de conditions de vies décentes indépendamment du soutien parental et nous paraît être une mesure propre à atténuer la reproduction sociale. Il est cependant clair que cette réduction des inégalités économiques ne saurait les supprimer complètement, et que d’autres inégalités, en particulier dans la distribution des capitaux culturels et symboliques constituent un handicap à un accès universel à la formation supérieure. Le revenu de base constitue également un atout dans la lutte contre d’autres discriminations, par exemple celles en fonction du genre ou de la nationalité.

Le revenu de base a également le mérite de constituer une proposition offensive face aux démantèlements qui frappent les acquis des étudiants. Plutôt que de se contenter de défendre le système actuel, insatisfaisant sur bien des points [6] même dans les cas où une bourse est obtenue, il semble plus pertinent de militer en faveur d’un système favorisant réellement un accès universel aux études en supprimant les barrières économiques. La lutte pour un financement inconditionnel des études est une concrétisation de « la vision alternative à la vision capitaliste de l’éducation et de la recherche scientifique » [7] voulue par la CUAE. Le choix de l’allocation universelle plutôt que du revenu étudiant permet d’étendre cette revendication à d’autres catégories de la population et de développer des collaborations avec d’autres mouvements poursuivant des buts similaires, et donc d’étendre le combat anticapitaliste à l’ensemble de la société.

Les termes au féminin de ce texte s’entendent bien entendu aussi au masculin.

[1] Stassen, Jean-François, et al., Etudiants 2004 , Université de Genève, 2005, pp. 26-27.

[2] Stagnation des dépenses pour les bourses d’études, baisse des dépenses pour les prêts d’études, communiqué de presse de l’Office fédéral de la Statistique, 26 novembre 2006.

[3] Voir en particulier les projets de loi PL 9818 et PL 9856. De plus, la loi sur l’université est actuellement en complète révision, confiée à une commission externe. Voir à ce sujet les communiqués de presse de la CUAE du 26 juillet 2006 et du 19 février 2007.

[4] Stassen, Jean-François, et al., Etudiants 2004, pp 34-36.

[5] Office fédéral de la Statistique, Situation sociale des étudiant-e-s 2005, 2006, p. 11.

[6] Par exemple l’insuffisance du montant maximal de la bourse pour subvenir complètement aux besoins du bénéficiaire, la dépendance parentale dans laquelle sont placés les étudiants, ou encore les exigences académiques (critère de normalité d’études) qui frappent particulièrement les étudiants qui doivent consacrer une partie de leur temps à un travail rémunéré.

[7] Statuts de la CUAE, article 3 : Buts.

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Révision de la loi sur l'université

Dans le cadre de la troisième révision substantielle de la loi sur l’université en moins de quinze ans, la commission extraparlementaire (CELU) chargée d’élaborer un avant-projet de loi s’est rendue à l’Université de Genève la semaine dernière. Conformément aux recomandations patronales formulées au travers des “experts” de l’OCDE, Dreifuss et consorts ont décidé de jouer la mascarade d’une large consultation auprès des différents corps animant l’UNIGE. Puisque nous ne sommes évidamment pas méchant_e_s, nous formulons l’hypothèse alternative selon laquelle la CELU, étant en manque dramatique de légitimité, cherche à en acquérir via ces “moments de socialisation” ; elle essayera ainsi de justifiera le bien fondé de son avant-projet de loi de part l’adhésion de “la communauté universitaire”.

Pour information, il faut savoir que la CELU a été nommé pour introduire l’autonomie financière à l’UNI (par là il faut entendre l’instauration des bases légales de sa privatisation [ref]voir le n° de Regard Critique consacré à la votation fédérale du 21 mai dernier sur les révisions constitutionnelles[/ref].)

Nous considérons cette consultation comme grotesque et le seul mérite qu’elle a, est de mettre en lumière la considération que le champ politique manifeste à l’égard des dominé_e_s parmi ceux et celles qui devraient être les acteurs de l’alma mater puisqu’ils/elles l’animent. À ce sujet on consultera notre communiqué de presse du 26 juillet 2006 à l’occasion de la présentation de la CELU par le conseil d’état genevois.

En attaché vous trouverez la prise de position d’un étudiant convié à cette foire organisée par la CELU ainsi que le tract que nous avons distribué afin de dissuader les étudiant_e_s à cautionner – au travers de leur participation – d’être employé_e_s comme alibi pour justifier des décisions qui vont à l’encontre d’une réelle démocratisation de l’accès à l’uni et de l’amélioration de nos conditions d’études. Pour l’anecdote, il vaut la peine de souligner que parmi les quelques quatre-vingts étudiant_e_s contacté_e_s par la CELU, il y’en avait trois au quatre…

Tract

Quand la dictature du marché s’impose aux universités

Comme de vulgaires larbins, les membres de la commission externe et leur employeur – le Conseil d’Etat genevois – s’adonnent insoucieusement à l’instauration de l’ « autonomie » de l’université. La concurrence (dont l’ « autonomie » est un des outils) est érigée en nouvelle doxa. Après la libération du joug de l’Eglise, l’Etat est désormais confronté à celui de la logique marchande (dont la concurrence est la pièce maîtresse dans son application ultra-libérale.) Le monde politique et ses valets se réunissent de manière quasi-mystique autour de ce consensus aux allures « universalistes » et ensemble entretiennent l’illusio que la concurrence est le garant de la démocratie. L’histoire récente de l’enseignement supérieur helvétique nous en fournit un exemple exemplaire. Depuis la signature de la déclaration d’intention de Bologne (dont l’introduction laisse d’ores et déjà transparaître les répercussions) toutes les décisions concernant les étudiant-e-s (modification de la loi genevoise sur l’université de 2003, modification des articles constitutionnels sur l’éducation, etc. pour ne citer que les plus illustres…) ont été prises sans que les personnes directement intéressées aient la possibilité de faire peser leurs points de vue et sans qu’un réel débat public ait pu avoir lieu.

Nous refusons de servir d’alibi!

Nous dénonçons le caractère illégitime de cette commission externe et sa non-représentativité.

Nous affirmons notre refus de l’expertocratie au service du capital.

Nous dénonçons le déficit démocratique entourant les enjeux concernant l’université.

Nous exigeons la dissolution de la commission externe.

Nous exigeons une gestion paritaire de l’université!

Nous exigeons l’abolition des taxes universitaires!

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L'absolue nécessité du revenu de base [Courants]

Texte paru dans Courants décembre 2006

L’ABSOLUE NÉCESSITÉ DU REVENU DE BASE

Le revenu de base désigne une rente à laquelle a droit – de manière inconditionnelle – tout citoyen ou résident. Le droit à ce revenu est inaliénable et cette mesure financière est versée à tout un chacun indépendamment du titre de séjour, du fait d’avoir travaillé et cotisé dans le passé et de la vérification d’une nécessité. Par ailleurs, d’autres sources de revenus peuvent s’y additionner et aucune contrepartie n’est exigée.

Deux ans après Groenroux1, le comité de la CUAE s’est donné les moyens pour relancer le dossier revenu de base. D’une part, il se doit de donner suite aux décisions issues de ses assemblées générales et d’autre part il s’est rendu compte, dans le contexte politique et social actuel, dans lequel les attaques néolibérales contre les biens communs se généralisent et prennent encore plus d’envergures qu’il y a quelques années2, les conditions matérielles d’existence des étudiant_e_s – surtout de ceux et celles issues de familles les plus fragiles en capital financier – ne cessent de se détériorer3 et la « reproduction sociale » reste d’une flagrante actualité4, que le seul moyen de sortir d’une logique uniquement réactive est de travailler sur un dossier échappant au calendrier politique. Si réagir au coup par coup aux attaques substantielles contre la formation reste certes une tâche incontournable pour un syndicat comme le nôtre, cette approche, outre à s’avérer frustrante sur le moyen-long terme, est politiquement insuffisante en regard des objectifs de la CUAE. S’opposer à toute mesure introduisant davantage de sélection dans le domaine de l’enseignement supérieur reste notre rôle principal; néanmoins, pour que l’autre facette de la mission de la CUAE se réalise, à savoir la promotion d’une vision alternative de la formation supérieure et de la recherche, il est indispensable que parallèlement nous poursuivions un travail de fond dont l’aboutissement sera l’élaboration d’une proposition concrète allant de toute manière à l’encontre de ce qui est aujourd’hui proposé et qui serait le fruit de notre analyse sur la situation actuelle. Comme il l’était déjà dans l’esprit des membres de la CUAE à l’origine des discussions sur l’introduction d’un revenu minimum garanti, le revenu de base reste un sujet pouvant en grande partie se soustraire au contrôle du dispositif bourgeois et par là même nous fournir un instrument de lutte susceptible de déplacer les débats sur un terrain qui est plus propice à la résolution des problèmes avec lesquels notre société est confrontée. L’exigence de l’introduction d’une telle mesure financière est d’autant plus criante après la dernière publication de l’Office Fédéral de la Statistique (2006) sur l’évolution des bourses et prêts d’études cantonaux5 qui ont diminué ces dix dernières années en valeur réelle, alors que par exemple les nouvelles inscriptions dans les Hautes Écoles6 n’ont cessé de croître.

1Pour un aperçu des conclusions provisoires émergées lors des discussions à Groenroux (avril 2004) on lira le n°28 de Regard Critique à disposition sur le site internet de la CUAE à l’adresse: http://www.asso-etud.unige.ch/cuae/spip.php?article21

2Le dernier en ordre chronologique, l’adoption par le champ politique des articles constitutionnels sur la formation. On trouveras les modifications constitutionnelles (FF 2005 6793) sur le site web de la Confédération à l’adresse: https://www.admin.ch/opc/fr/federal-gazette/2005/index_51.html

3Nous pensons au développement des « mac-jobs », à la « crise du logement » qui sévit par exemple Genève, etc.

4Pour un aperçu on consultera les statistiques réalisées par l’Office Fédéral de la Statistique (2005) sur l’Origine sociale des étudiants HE à l’adresse: http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15/06/key/ind12.approach.1201.html. Bien que méthodologiquement discutables, ces données montrent néanmoins que la probabilité de suivre une formation au sein d’une université ou d’une école polytechnique fédérale est inégalement distribuée si l’on compare un étudiant dont un parent au moins a suivi ce type d’enseignement avec un autre étudiant dont aucun parent ne l’a suivi.

5Vous pouvez télécharger l’intégralité du rapport sur le site internet de l’OFS à l’adresse suivante: http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/15/22/publ.html?publicationID=2457

6La catégorie des « Hautes Écoles » comprend: les Universités, les deux Écoles Polytechniques Fédérales, les Hautes Écoles Spécialisées et les Haute Écoles Pédagogiques.

L’assemblée générale de la CUAE du 22 novembre 2006 a donc adopté la déclaration d’intentions suivante:

DÉCLARATION DE SAIGNELÉGIER

18-20 août 2006

Considérant que toute mesure financière réduisant l’inégalité de la redistribution du capital économique est une condition nécessaire, bien que non suffisante, à la construction d’une alternative à la vision capitaliste de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique;

Considérant le résultat de l’action directe dite « La Fin du Droit »;

La CUAE, dans le cadre des attaques néolibérales contre l’éducation supérieure, promeut le Revenu de Base comme un moyen contribuant à atteindre des contenus et des organisations des enseignements et des recherches alternatifs à la vision capitaliste.

De plus, elle mènera une étude approfondie sur les régularités statistiques qui caractérisent le tissu social en se concentrant plus particulièrement sur les effets de la distribution inégale des capitaux économiques, culturels et symboliques parmi les personnes en formation.

Par ailleurs, face à la vision dominante de l’enseignement, elle soutiendra par tous les moyens qu’elle estimera adéquats toutes les initiatives promouvant l’instauration d’un Revenu de Base susceptible de réduire les inégalités matérielles.

Dans le cadre de ses actions, la CUAE se procurera les outils nécessaires à la réalisation de ses objectifs.

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Le prix de l'aspirant requin

Le 18 octobre 2006, la CUAE a réagi au sein de l’Université à la censure dont a fait l’objet son site internet en interrompant la séance du Conseil de l’Université. L’occasion nous a semblé propice non seulement pour récompenser la nouvelle équipe rectorale pour le zèle avec lequel elle s’adonne sans relâche depuis désormais un mois à accomplir la mission pour laquelle le Conseil d’État l’a choisi, mais également en exiger la démission.

Un mois à peine après son entrée en fonction, le nouveau recteur de l’Université de Genève se distingue en obtenant le très convoité prix de l’aspirant requin.

Après le prix Comtesse [ref] c.f. Xavier Comtesse, du groupe de pression Avenir Suisse [/ref] – alloué par la CUAE à la personnalité académique qui s’est le plus distinguée dans le combat pour l’affirmation idéologique des principes marchands au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique – il était temps d’établir un nouveau concours. Il ne s’agit pas du prix du meilleur enseignant, cet enjeu ne faisant pas le poids face au prix pour l’aspirant requin. Cette récompense symbolique a été conçue pour distinguer la personnalité qui incarne le plus fidèlement l’esprit de la Nouvelle Gestion publique en matière de formation supérieure.

En ces temps de déperdition collective au sein des administrations étatiques, plusieurs candidats se sont déjà mis en évidence pour leur zèle quant à l’introduction du NPM. Parmi eux nous ne citerons que J.-M. Rapp (ancien recteur de l’Université de Lausanne), Martine Brunschwig Graf (ancienne conseillère d’état genevoise) ainsi que la plupart des membres de la commission externe chargée de l’élaboration d’un projet de loi sur l’université. Puisque les deux premiers noms que nous avons cités ont déjà réussi, tout ou en partie, à réaliser leur projet dans les institutions respectives (ils représentent en ce sens des modèles, sorte de divinités en la matière), il nous a donc semblé nécessaire d’allouer le prix de l’aspirant requin à des figures émergentes…

La censure de notre site internet de la part du nouveau rectorat nous a rappelé le scénario allégorique décrit par Bertold Brecht dans Wenn die Haifische Menschen wären et plus particulièrement la partie que nous vous invitons à lire concernant l’éducation dans « ce monde sous-marin »…

Es gäbe natürlich auch Schulen in den großen Kästen. In diesen Schulen würden die Fischlein lernen, wie man in den Rachen der Haifische schwimmt. Sie würden z.B. Geographie brauchen, damit sie die großen Haifische, die faul irgendwo rumliegen, finden könnten. Die Hauptsache wäre natürlich die moralische Ausbildung der Fischlein. Sie würden unterrichtet werden, dass es das Größte und Schönste sei, wenn ein Fischlein sich freiwillig aufopfert, und sie alle an die Haifische glauben müssten, vor allem, wenn sie sagten, sie würden für eine schöne Zukunft sorgen. Man würde den Fischlein beibringen, dass diese Zukunft nur gesichert sei, wenn sie Gehorsam lernten. Vor allen niedrigen, materialistischen, egoistischen und marxistischen Neigungen müssten sich die Fischlein hüten, und es sofort melden, wenn eines von ihnen solche Neigungen verriete.

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Déclaration de Saignelégier

Déclaration d’intentions de la CUAE concernant le revenu de base

Deux ans après Groenroux, le comité de la CUAE s’est donné les moyens pour relancer le dossier revenu de base, d’une part parce qu’il se doit de donner suite aux décisions issues de ses assemblées générales et d’autre part parce qu’il s’est rendu compte, dans le contexte politique où les attaques néolibérales contre les biens communs se généralisent et prennent encore plus d’envergures qu’il y a quelques années (le dernier en ordre chronologique, l’adoption par le champ politique des articles constitutionnels sur la formation), que le seul moyen de sortir d’une logique uniquement réactive est de travailler sur un dossier échappant au calendrier politique. Si réagir au coup par coup aux attaques substantiels contre la formation reste certes une tâche incontournable pour un syndicat comme le notre, cette approche, outre à s’avérer frustrante sur le moyen-long terme, politiquement est insuffisante en regard des objectifs de la CUAE. S’opposer à toute mesure introduisant davantage de sélection dans le domaine de l’enseignement supérieur reste notre rôle principal, néanmoins, pour que l’autre facette de la mission de la CUAE se réalise, à savoir la promotion d’une vision alternative de la formation supérieure et de la recherche, il est indispensable que parallèlement nous poursuivions un travail de fond dont l’aboutissement sera l’élaboration d’une proposition concrète allant de toute manière à l’encontre de ce qui est aujourd’hui proposé et qui serait le fruit de notre analyse sur la situation actuelle. Comme il l’était déjà dans l’esprit des membres de la CUAE à l’origine des discussions sur l’introduction d’un revenu minimum garanti, le revenu de base reste un de ces sujets pouvant en grande partie se soustraire au contrôle du dispositif bourgeois et par là même nous fournir un instrument de lutte susceptible de déplacer les débats sur un terrain qui est plus propice à la résolution des problèmes avec lesquels est confronté notre société.

Le comité de la CUAE a donc adopté la déclaration d’intentions suivante :

DÉCLARATION DE SAIGNELÉGIER

18-20 août 2006

Considérant que toute mesure financière réduisant l’inégalité de la redistribution du capital économique est une condition nécessaire, bien que non suffisante, à la construction d’une alternative à la vision capitaliste de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique ;

Considérant le résultat de l’action directe dite « La Fin du Droit » ;

La CUAE, dans le cadre des attaques néolibérales contre l’éducation supérieure, promeut le Revenu de Base comme un moyen contribuant à atteindre des contenus et des organisations des enseignements et des recherches alternatifs à la vision capitaliste.

De plus, elle mènera une étude approfondie sur les régularités statistiques qui caractérisent le tissu social en se concentrant plus particulièrement sur les effets de la distribution inégale des capitaux économiques, culturels et symboliques parmi les personnes en formation.

Par ailleurs, face à la vision dominante de l’enseignement, elle soutiendra par tous les moyens qu’elle estimera adéquats toutes les initiatives promouvant l’instauration d’un Revenu de Base susceptible de réduire les inégalités matérielles.

Dans le cadre de ses actions, la CUAE se procurera les outils nécessaires à la réalisation de ses objectifs.