Campagne contre les listes de présence à l'Unige

La CUAE et ses associations membres ont entamé ce semestre une réflexion autour des listes de présence dans les cours. En effet, cette pratique pernicieuse et infantilisante est en train de se répandre dans plusieurs facultés de l’Université de Genève et cette année des nombreux dérapages ont été signalé (invitations à la délation, fichage des étudiantes etc…).

Nous reproduisons ici la lettre adressé par certaines Associations facultaires à l’Assemblée de l’Université et l’affiche de la CUAE pour lancer cette campagne

Genève, le 11 mars 2014

 

Chèr-e-s membres de l’Assemblée de l’Université,

Régulièrement évoquées dans les instances participatives, les listes de présence se trouvent dans la zone grise des pratiques des enseignant-e-s. L’Université de Genève n’a émis aucune directive à ce sujet et leur utilisation n’est guère formalisée, sauf en Faculté de médecine où l’organisation des études dépend des instances fédérales. Aucun débat sur cette question n’a eu lieu depuis 2010, moment où l’Assemblée de l’Université avait pris position contre l’existence des listes de présence dans les cours ex cathedra[1].

Nous prenons contact avec vous aujourd’hui car des dérives préoccupantes ont été observées depuis la rentrée académique de septembre 2013. Dans certaines facultés, des professeur-e-s ont en effet demandé aux étudiant-e-s de leur fournir une photo portrait afin de faciliter le contrôle des présences. De plus, des encouragements à dénoncer les étudiant-e-s absent-e-s sont même lancés par les enseignant-e-s durant des cours ex cathedra. Ces pratiques d’intimidation doivent être dénoncées avec la plus grande vigueur, notamment en raison de l’ambiance d’enseignement inadéquate et malsaine qu’elles provoquent.

L’utilisation de listes de présence est incompatible avec une certaine idée de la liberté académique. On a en effet tendance à associer celle-ci exclusivement à la liberté d’activité des équipes de recherche universitaires. Or, la liberté académique inclut tout autant l’autonomie dont devraient bénéficier les étudiant-e-s dans le processus d’apprentissage et d’assimilation d’une discipline.

Qu’évalue-t-on au juste lorsqu’on nous demande d’être obligatoirement assis en classe ? Sans vouloir entrer dans le débat sur les causes des salles quasi vides de certains professeur-e-s, force est de reconnaître qu’aucun savoir n’est évalué avec les listes de présence. La scolarisation  de l’enseignement supérieur n’est pas une tendance souhaitable, c’est pourquoi nous entendons réaffirmer que la présence passive aux cours ne saurait être considérée comme un critère d’évaluation pertinent.

En outre, le quotidien des étudiant-e-s a changé depuis une dizaine d’années : 75 % des personnes en formation tertiaire doivent aujourd’hui travailler en parallèle de leurs études. Outre ces charges de travail rémunéré, il faut ajouter les éventuels enfants à charges ou d’autres types d’obligations. Dans de nombreuses situations, l’absence aux cours n’est donc pas un choix, mais une obligation imputable au coût de la vie à Genève ou aux dysfonctionnements du système des bourses d’études.

Il n’est, bien sûr, pas question que l’UNIGE règle l’ensemble de ces problèmes mais qu’elle prenne au moins en considération ces changements dans la condition étudiante. Les listes de présence ont en effet le défaut de pénaliser une seconde fois les étudiant-e-s les plus précaires, dont les horaires de travail irréguliers peuvent entrer en conflit avec les heures de cours. La suppression des listes de présence met donc fin à une discrimination injuste basée sur la capacité financière des étudiant-e-s.

En vertu des compétences qui lui sont attribuées au sein de l’UNIGE, nous vous demandons que l’Assemblée se saisisse avec urgence de ce dossier.

En vous remerciant d’avance pour l’attention que vous voudrez bien consacrer à cette demande, nous vous prions d’agréer, chèr-e-s Membres de l’Assemblée de l’Université, nos salutations les meilleures.

L’Association des Étudiant-e-s en Histoire Économique (AEHES)

L’Association des Étudiant-e-s en Traduction et Interprétation (AETI)

L’Association des Étudiant-e-s en Psychologie (ADEPSY)

L’Association des Étudiant-e-s en Physique (AEP)

L’Association des Étudiant-e-s en Français Moderne (AEFRAM)

L’Association des Étudiant-e-s en Biologie (AEB)

L’Association des Étudiant-e-s en Socioéconomie & Démographie (As&D)

L’Association des Étudiant-e-s en Sciences Po et Relations Internationales (AESPRI)

L’Association des étudiants en Lettres (AEL)

La Conférence Universitaire des Associations d’Étudiantes (CUAE)



[1] Procès Verbal de l’Assemblée de l’Université du 13 janvier 2010

Campagne contre les listes de présence à l'Unige